Selon les souvenirs de chacun, le sable rappelle des plages en bord de mers ou de lacs, des dunes à l’arrière de plages, des déserts et leurs dunes, des sablières voire des chantiers de construction. Quant à collectionner des sables, les motivations sont diverses: souvenirs de lieux de vacances, témoins des plages ou des dunes d’une région ou d’un pays, création d’une palette de couleurs de nuances infinies, observation et étude du contenu minéral et/ou organique.
L’origine du sable a été expliquée dans la chronique 4. On en déduit que le sable peut se définir comme un assemblage meuble de fragments de roches, de minéraux et d’organismes vivants fossilisés. Ces fragments sont appelés grains. En tant que matériau, le sable est défini par la granulométrie de ses grains qui est comprise entre 2 et 0,063 mm (voir note 1). Au-dessus de 2 mm, on parle de graviers, puis de galets et de blocs; en dessous de 0,063 mm, de limon et d’argile. A partir de cette définition, les arénophiles considèrent que, parmi les éjectas des volcans, ceux appelés cendres dont la fraction dite sableuse a une granulométrie similaire, font aussi partie des sables de collection. (voir note 2)
Les dépôts de sable se rencontrent principalement aux bords et sur les fonds des mers et océans, et dans les déserts sous forme de dunes principalement. Ils se rencontrent aussi sur les rives des lacs et des rivières, dans le lit de celles-ci, dans certaines carrières (les sablières), dans les stériles miniers et les régions volcaniques. Deux modes de transport créent ces dépôts: l’hydraulique par les cours d’eau et les courants marins, et l’éolien par le vent. Le transport peut atteindre des milliers de km. Il altère la forme et l’aspect des grains. Ainsi selon la distance et le mode de transport, les grains seront d’une part, anguleux, émoussés (partiellement usés) ou arrondis, et d’autre part, mats ou brillants. Un grain arrondi et mat sera toujours la preuve d’un transport éolien, tandis que les autres formes et aspects le seront d’un transport hydraulique. Dans les deux modes, le degré d’usure augmente avec la distance et la brillance des grains de plage avec les mouvements successifs des courants marins.
Le contenu des sables est très varié. Ainsi, sur une plage en bord de mer, on trouvera ici des fragments de roches et de minéraux, là des débris de coquillages, ailleurs un mélange des deux. On trouvera également des morceaux de coraux, de bryosoaires, d’organes d’invertébrés comme des antennes de crustacés, des squelettes d’éponges ou spicules, des piquants d’oursins ou radioles et surtout des organismes unicellulaires entiers: les foraminifères. Se rencontrent également des morceaux de verres colorés, plus ou moins polis, des billes de peintures réfléchissantes utilisées pour le marquage routier et autres déchets solides. En outre, le contenu peut varier au gré des saisons, notamment en fonction des courants marins.
La photo 1 montre un sable de plage formé de minéraux et la 2 de fragments polis de coraux et d’autres invertébrés (gastéropodes et bivalves).
Dans les rivières par contre, le contenu sera entièrement minéral et les dunes des déserts ne contiendront que du quartz.
Un sable de rivière, aux grains anguleux, est illustré sur la photo 3 et un sable de dune de désert, aux grains arrondis et mats, sur la photo 4.
Quels sont les minéraux susceptibles de se retrouver dans les sables?
Ce sont des minéraux qui résistent à l’abrasion par leur dureté, à la décomposition par l’eau et les acides faibles par leur composition. Ce sont donc les minéraux durs qui ont le plus de chance de se retrouver dans les sables. Exception faite toutefois pour les micas, groupe de minéraux tendres, trouvés le plus souvent dans les cours d’eau. Par ordre de fréquence décroissante, citons le quartz qui constitue souvent plus de 90% du contenu minéral. Ensuite les minéraux lourds comme la magnétite et les grenats, et, malgré leur légèreté, les micas blancs et noirs. Puis d’autres minéraux lourds comme les béryls, les spinelles et les zircons.
La photo 5 montre un sable à grenats roses, à magnétite noire et saphirs bleus.
Quant au contenu organique, l’intérêt se porte principalement sur les foraminifères que l’on trouve entiers dans les sables marins du monde entier, grâce à leur petite taille et à la bonne conservation de leur test. Il en existe plusieurs milliers d’espèces avec une diversité infinie de forme. C’est donc un plaisir pour les arénophiles de les observer et les collectionner. Etant donné leur existence en continu depuis environ 500 millions d’années, ils constituent des repères stratigraphiques de choix pour les géologues.
Des foraminifères, appelés numulites, sont montrés sur un sable de plage à la photo 6.
Quelques plages sont devenues célèbres grâce au contenu de leur sable, comme:
– plages de Vendée tapissées de divers types de grenats dans les tons roses, oranges et rouges, parmi lesquels se cachent des saphirs bleus,
– plages de l’île d’Elbe couvertes d’hématites et de magnétites noires,
– plages d’Hawaï, couvertes d’olivines jaune-vert translucides, dont une de Big Island est illustrée sur la photo 7,
– plages des îles de l’archipel d’Okinawa où s’étalent des foraminifères étoilés dits “Stars Sands” que s’arrachent les collectionneurs.
Certains cours d’eau d’Auvergne charrient des minéraux lourds dont des béryls, des corindons et des zircons. Celui de la photo 8 charrie notamment des zircons, grains brillants rouges et brun-clair.
Les sables recueillis sur les fonds marins sont étonnamment riches en invertébrés fossilisés, bien souvent complets qu’il s’agissent de bivalves ou de gastéropodes, et en foraminifères variés. Un de ces sables est illustré sur la photo 9.
Quant à l’intérêt de collectionner des sables, diverses motivations sont évoquées au début de cette chronique.
En outre, l’amateur de minéraux et/ou de fossiles peut ainsi se constituer une collection peu encombrante mais limitée quant au nombre de différents éléments et qui nécessite l’usage d’un microscope binoculaire pour l’observation.
Note 1 – Erratum Chronique #4 – le Cycle Géologique du Sable. Concernant la granulométrie des grains, il convient de lire que celle-ci est comprise entre 0,063 et non 0,63 et 2 mm.
Note 2 – Référence: Volcanologie, par Jacques-Marie Bardintzeff, 6° édition, chapitre 8 : Granulométrie des retombées.
Note 3 – les sables ont été photographiés par l’auteur de cet article et font partie de sa collection personnelle. Le grossissement des grains est compris entre 15 et 20.
Sources bibliographiques:
- Le Sable et ses mystères, par J. Lapaire et P. Melville, 2012.
- Le Cahier des Micromonteurs-Spécial Sables, n° 104, 02/2009.
- Atlas des Sables, volume 1 et 2, par J. Lapaire, 2017 et 2020.
La minéralogie comme la volcanologie sont des sciences qui évoluent avec le temps au fur et à mesure de l’avancée de la recherche et des connaissances. Ce qui est vrai à un instant T peut être remis en cause le lendemain.
Philippe Thiran, l’auteur de ce post, se tient à disposition de ceux qui voudraient échanger à propos des notions géologiques présentées. Vous pouvez nous contacter pour avoir ses coordonnées personnelles.
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